Les décrets abrogatifs et les décrets abrogés dans le Noble Coran
13/04/2011| IslamWeb
Toutes les religions divines ont apporté aux hommes le seul et même dogme, lequel dogme consiste à n’adorer qu’Allah, exalté soit-Il, et à abandonner l’adoration de tout autre que Lui. Tous les Messagers ont donc appelé leur peuple à cette croyance (sens du verset): « Adorez Allah, vous n’avez pas d’autre divinité en dehors de Lui.» (Coran : 23/32). Toutefois, les règles législatives étaient différentes d’une Loi à l’autre ; Allah, exalté soit-Il, a dit à ce propos (sens du verset): « À chaque communauté, Nous avons assigné un culte à suivre.» (Coran : 22/67).
La Loi de l’Islam (la Chari’a) est venue abroger et supplanter les Lois qui l’ont précédée. Il y a derrière les règles instaurées par Allah, exalté soit-Il, une sagesse que Lui-seul connaît, de même que c’est par sagesse qu’Il les abroge. Allah a procédé ainsi jusqu’au moment où les règles de la Loi ont enfin été fixées de manière définitive. Ainsi, Allah a parachevé Sa religion, comme Il nous en a informés par Sa parole, exalté soit-Il : « Aujourd’hui, J’ai parachevé pour vous votre religion.» (Coran : 5/3).
Les savants ont cherché les décrets abrogatifs et les décrets abrogés dans le cadre d’études ayant trait aux sciences du Saint Coran, certains d’entre eux ont même consacré des ouvrages à ce sujet.
L’abrogation consiste en l’annulation d’une disposition législative par un nouveau décret du Législateur, Allah (exalté soit-Il), c’est pourquoi l’abrogation ne peut être le fruit de la raison ou de l’effort d’interprétation (Ijtihad).
Seuls les ordres et les interdictions légales sont concernés par l’abrogation ; ainsi, cette dernière n’intervient pas dans les domaines des croyances, du comportement, des fondements des adorations ou encore des textes qui ne contiennent pas explicitement un ordre ou une interdiction.
La connaissance des décrets abrogatifs et des décrets abrogés a une grande importance aux yeux des gens de science, car les connaître c’est connaître les dispositions législatives, et notamment ce qui est resté en vigueur de ces dernières et ce qui en a été abrogé.
Les gens de science ont défini des méthodes grâce auxquelles on peut connaître les décrets abrogatifs et les décrets abrogés ; parmi ces dernières, on trouve les dispositions explicites rapportées du Prophète () ou d’un compagnon ; voici en exemple un hadith rapporté du Prophète (): « Je vous avais interdit de visiter les tombes, mais désormais visitez-les.» (Rapporté par Muslim).
Pour ce qu’il s’agit d’une parole rapportée d’un compagnon, voici par exemple ce qu’a dit Anas, qu’Allah soit satisfait de lui, au sujet des compagnons qui combattirent à Bir Ma‘ûna : un verset du Coran les concernant descendit, nous le lûmes, puis il fut abrogé : « Dites à notre peuple que nous avons rencontré notre Seigneur, qu’Il est satisfait de nous et que nous sommes satisfaits de Lui.» (Rapporté par Al-Bukhârî).
Parmi les autres méthodes de détermination de l’abrogation, on trouve également le consensus de la Communauté ainsi qu’une bonne connaissance historique de la règle distinguant l’ancien et le nouveau.
Il est nécessaire de rappeler que l’abrogation ne peut être établie par l’effort d’interprétation, pas plus que par une simple mise en évidence des contradictions apparentes pouvant exister entre les preuves. Donc, toutes ces choses, et ce qui relève du même ordre, ne peuvent en aucune manière établir l’abrogation.
Notons qu’il existe plusieurs sortes d’abrogations. Parmi celles-ci, on trouve l’abrogation du Coran par le Coran à l’exemple de cette parole d’Allah, exalté soit-Il (sens du verset): « Ils t’interrogent sur le vin et les jeux de hasard. Dis : " Dans les deux, il y a un grand péché et quelques avantages pour les gens "» (Coran : 2/219), laquelle fut abrogée par le verset suivant (sens du verset): « Le vin, le jeu de hasard, les pierres dressées, les flèches de divination ne sont qu’une abomination, œuvre du Diable, écartez-vous en» (Coran : 5/90). Voilà donc un type d’abrogation autorisé à l’unanimité.
Parmi les autres types d’abrogations, on trouve également l’abrogation de la Sunna par le Coran. Ce fut le cas par exemple de l’abrogation de la Qibla orientée vers Jérusalem, laquelle avait été établie par la Sunna, par la parole d’Allah, exalté soit-Il (sens du verset): « Tourne donc ton visage vers la Mosquée sacrée» (Coran : 2/144) ; ou bien encore de l’abrogation de l’obligation établie par la Sunna de jeûner le jour de ‘Âchûrâ par une parole d’Allah, exalté soit-Il, rendant obligatoire le jeûne du Ramadân : « Donc, quiconque d’entre vous est présent en ce mois, qu’il jeûne ! » (Coran : 2/185).
Au nombre des abrogations, on trouve aussi l’abrogation de la Sunna par la Sunna. C’est ainsi que le mariage de jouissance (nikah al-mut‘a), qui fut d’abord autorisé, a été abrogé ; voici donc ce que rapporte Iyâs ibn Salama de son propre père : « Le Messager d’Allah () avait autorisé le mariage de jouissance durant l’année de l’Awtâs, puis il l’a interdit.» (Rapporté par Muslim). Al-Bukhârî a d’ailleurs donné comme titre à l’un des chapitres de son Sahîh : Finalement, interdiction du mariage de jouissance par le Messager d’Allah (Salla Allahou ‘Alaihi wa Sallam).
L’abrogation coranique est de trois types :
1- L’abrogation de la lecture du verset aussi bien que du décret qu’il contient : en voici un exemple à travers un hadith de ‘Âicha : « Au début, le nombre d’allaitement révélé dans le Coran, interdisant le mariage entre frères et sœurs de lait, était de dix allaitements connus, puis le verset a été abrogé et remplacé par cinq allaitements connus» (Rapporté entre autres par Muslim).
2- L’abrogation du décret contenu dans le verset, mais pas de sa lecture : voici à titre d’exemple une parole d’Allah, exalté soit-Il (sens du verset): « Maintenant, Allah a allégé votre tâche, sachant qu’il y a de la faiblesse en vous. S’il y a cent endurants parmi vous, ils vaincront deux cents ; et s’il y en a mille, ils vaincront deux mille, par la grâce d’Allah. Et Allah est avec les endurants» (Coran : 8/66) ; ce verset a donc abrogé le décret contenu dans le verset précédent sans en abroger la lecture, ainsi, Allah, exalté soit-Il, dit dans ce verset précédent : « Ô Prophète, incite les croyants au combat. S’il se trouve parmi vous vingt endurants, ils vaincront deux cents ; et s’il s’en trouve cent, ils vaincront mille mécréants, car ce sont vraiment des gens qui ne comprennent pas » (Coran : 8/65).
3- L’abrogation de la lecture du verset, mais pas du décret qu’il contient : on en a un exemple dans le hadith de ‘Âicha, qu’Allah soit satisfait d’elle, précédemment cité : (puis le verset a été abrogé et remplacé par cinq allaitements connus) ; ainsi, la limitation à cinq du nombre d’allaitements rendant le mariage illégal entre frères et sœurs de lait est établie par un décret, mais n’apparaît pas dans le Coran.
Il y a dans l’utilisation de l’abrogation par le Législateur, exalté soit-Il, de nombreuses sagesses, parmi lesquelles on trouve la prise en considération des intérêts des serviteurs. Il ne fait aucun doute que certains des besoins de la prédication islamique à ses débuts n’étaient plus les mêmes après que cette dernière se fut structurée et stabilisée. Ces évolutions ont donc nécessité la modification de certains décrets ainsi qu’une prise en compte de ces besoins. Ces évolutions apparaissent clairement lorsque l’on juxtapose certains décrets des périodes mecquoises et médinoise ou bien que l’on compare le début de l’époque médinoise avec le moment où décède le Messager d’Allah ().
Parmi les autres sagesses que recèle l’abrogation, on trouve la mise à l’épreuve des personnes concernées (les serviteurs d’Aallah) à travers le choix entre obéir ou non aux commandements divins. De même qu’il y a derrière ces abrogations le souhait divin de rechercher le bien pour cette communauté ainsi que de lui faciliter les choses. En effet, si l’abrogation amène un décret plus strict alors la récompense sera plus grande, et si elle amène plutôt un allégement alors il y a là une facilitation. Qu’Allah nous accorde la réussite dans l’application des décrets de Sa Loi, qu’Il nous donne la connaissance des règles de Sa religion et qu’Il nous facilite l’imitation de Son Prophète ().