Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :
L’avis correct parmi ceux émis par les savants concernant la raison du caractère usuraire de l’or et de l’argent est que ce sont des biens qui déterminent une valeur. Cheikh Al-Islam ibn Taymiyya a dit : « Ce qui nous semble le plus juste est que la raison de l’interdiction de l’usure concernant les dinars et les dirhams est qu’ils correspondent à un critère de valeur comme l’ont affirmé la plupart des savants. Et non pas en raison du fait qu’ils correspondent à un critère de poids … Indiquer que le critère de valeur des choses est la raison du caractère usuraire de l’or et de l’argent est une justification qui correspond parfaitement à leur caractéristique. En effet, l’objectif des prix est qu’ils soient un critère de valeur des choses via lequel il nous est possible de déterminer ce qu’ils valent. Il ne s’agit pas de tirer profit d’eux en soi. Si on achète l’un en échange de l’autre en en prenant possession plus tard c’est que l’objectif a été de commercer avec ce qui va à l’encontre de la finalité de ces métaux qui ont pour objet de déterminer la valeur des biens. » Fin de citation avec une légère adaptation, tiré de Majmu’ Al-Fatâwa.
Dans son ouvrage I’lâm Al-Muwaqqi’în, Ibn Al-Qayyim dit : « Pour ce qui est des dirhams et des dinars (c’est-à-dire les pièces d’or et d’argent), un groupe de savant a dit : La raison de leur caractère usuraire est qu’ils sont pesables. C’est l’avis de Ahmad selon une des deux versions rapportées de lui et c’est aussi l’avis de l’école de Abou Hanifa. Un autre groupe a dit : La raison est qu’ils sont un critère de valeur des biens. C’est l’avis de Shâfi’î, Malik et un des avis rapportés de Ahmad. Ce dernier avis est celui qui est correct, et même celui qui est authentique. » Fin de citation.
Appliquer la divergence des anciens savants au sujet du statut de ce qu’on appelait à l’époque le Flous (des monnaies différentes mais composées d’or ou d’argent) pour affirmer qu’ils ont le même statut que les billets de banque contemporains est un procédé inexact. A notre époque, l’or et l’argent n’est pas la monnaie d’échange entre les pays et les individus comme c’était le cas avant. Les billets de banque tiennent aujourd’hui exactement la place qui était la leur à l’époque. Or, les transactions via des billets de banque n’est jamais arrivé à l’époque des anciens savants. Au mieux, ce qui pouvait exister à leur époque est la présence de quelques autres monnaies qu’on appelait Flous sachant que ces monnaies étaient également composées d’or et d’argent.
Dans le livre Al-Fiqh Al-Islâmi Wa Adillatuhu de Al-Zuhaylî, il est dit : « Un des aspects de la décadence de la pensée et une des manifestations blâmables du savoir réside dans l’assertion suivante : « les billets de banque ne pouvant être pesés, on ne doit pas les considérer comme des biens concernés par l’interdiction usuraire, il faut plutôt les considérer comme des biens commerciaux. » D’autres la formulent ainsi : « Les billets de banque – comme le Flous – ne sont pas concernés par l’interdiction usuraire. » Or, une telle assertion est une ignorance de la réalité de ce qu’est l’argent. En effet, l’argent est par convention la valeur qu’on accorde aux choses, que ce soit des minerais ou tout autre chose. » Fin de citation.
Ceci étant, l’avis qui consiste à affirmer que les billets de banque que les gens utilisent à notre époque ne sont pas concernés par l’interdiction usuraire est inexact. Il en découle des faits très graves dont, notamment, que la Zakât n’est pas obligatoire sur les billets de banque.
L’avis correct sur cette question est que les billets de banque sont bien concernés par l’interdiction usuraire au même titre que l’or et l’argent. Et ce, pour les deux types d’usure (celui lié à la valeur nommé Ribâ Al-Fadl ; et celui lié au temps nommé Ribâ Al-Nasî’a). Les billets de banque sont également soumis à l’obligation de la Zakât. Les billets de banque sont aussi un critère de valeur effectif dans le cadre des ventes où le bien peut être remis après la conclusion du contrat (vente dite Al-Salam). Et ils ont aussi le même statut que l’or et l’argent dans les autres types de transaction.
C’est en fonction de ce statut qu’ont été émises les Fatwas des différents centres de jurisprudence et des savants contemporains. Un décret du Majma’ Al-Fiqh de la ligue islamique mondiale de la Mecque durant la cinquième session qui porte le numéro 6 stipule :
« Premièrement : étant donné que, par principe, l’argent et tout ce qui a de la valeur est évalué en fonction de l’or et de l’argent. Et que la raison pour laquelle le caractère usuraire de ces métaux est qu’elle détermine la valeur des choses selon l’avis le plus juste des savants et des juristes.
Et étant donné que pour ces savants, déterminer la valeur des choses ne peut être restreint à ces deux seuls minerais même si c’est à partir d’eux qu’en principe on les évalue.
Etant donné que les billets de banque sont devenus aujourd’hui un moyen de déterminer la valeur des choses et qu’ils tiennent lieu et place de l’or et de l’argent dans la façon dont les gens les utilisent. Et qu’à notre époque, c’est par le biais des billets qu’on évalue la valeur des choses vu que l’or et l’argent ne sont plus utilisés par les gens dans leurs transactions mais que ces derniers utilisent les billets de banque pour ce faire de façon sereine pour acheter quoi que ce soit, épargner, assumer ce qu’ils doivent et de façon générale, se dédouaner de toute responsabilité financière. Bien que leur valeur ne leur est pas intrinsèque mais extrinsèque, il s’agit de la confiance que les gens accordent à leur rôle d’intermédiaire dans leur utilisation et les échanges qu’ils en font, raison pour laquelle on lui attribue ce critère de détermination de la valeur des choses.
Et puisque c’est ce critère qui, en réalité, est la raison du caractère usuraire de l’or et de l’argent, et qu’il se vérifie dans les billets de banque.
Pour tout cela, le Majma’ Al-Fiqhî décrète : Les billets de banque sont une monnaie qui ont une valeur en soi. Ils ont le même statut que l’or et l’argent. Il est obligatoire de s’acquitter de la Zakât les concernant. Les billets de banque sont bien concernés par l’interdiction usuraire au même titre que l’or et l’argent. Et ce, pour les deux types d’usure (celui lié à la valeur nommé Ribâ Al-Fadl ; et celui lié au temps nommé Ribâ Al-Nasî’a). Vu que ces billets ont une valeur, par analogie à l’or et l’argent. Les billets de banque prennent donc le statut de monnaie d’échange dans toutes les obligations que la religion impose.
Deuxièmement : Les billets de banque sont une monnaie d’échange en soi, au même titre que l’or et l’argent et que d’autres biens qui peuvent déterminer la valeur des choses. De même, chaque billet de banque, en fonction de qui l’émet, à son propre statut, de façon indépendante, selon les différents pays. C’est-à-dire que la monnaie saoudienne est une monnaie, la monnaie américaine en est une autre, et ainsi de suite, chaque monnaie étant indépendante des autres. Et le caractère usuraire des billets de banque est dont effectif sous ses deux formes (liées au temps et à la valeur) comme c’est le cas pour l’or et l’argent et pour d’autres biens qui déterminent la valeur des choses. » Fin de citation.
La teneur de cette Fatwa a aussi été émise par le Majma’ Al-Fiqh Al-Islâmî à Jeddah dans le décret 21(3/9) suivi par le Majma’ Al-Fiqh Al-Islâmî des Indes dans le décret de 11/1989.
Et Allah sait mieux.