Cela fait maintenant près de six mois que je tente une expérience intéressante et originale ; en effet, j’ai décidé de me passer de mon portable pendant un certain temps, et ce, pour des raisons que je ne préfère pas révéler maintenant.
Il se trouve qu’avant cette expérience je passais plusieurs heures par jours sur mon téléphone, à parler ou bien à envoyer des messages. J’ai utilisé mon portable de cette manière pendant plus de quinze ans, et ce, jusqu’à ce que cette utilisation devienne la cause de parasitage de la communication et de mes relations avec les gens « réels » se trouvant en ma présence, je n’arrivais plus à me concentrer sur ce que ces derniers me racontaient, car en effet j’avais systématiquement un œil sur l’écran de mon portable. A la maison ou bien en voyage, la nuit ou le jour, je ne cessais en permanence de vérifier les messages dans mon téléphone.
Mais durant le dernier Ramadan j’ai décidé pendant l’I’tikâf de me contenter de communiquer avec les moyens de communications indirects se trouvant dans mon téléphone comme Tweeter, Instagram ou encore Facebook. Puis depuis quelques semaines j’ai commencé à ne plus regarder certains messages ou bien à en regarder certains autres rapidement, et qu’est-ce que cela m’a appris ? Eh bien j’ai découvert par cette expérience individuelle qu’il était tout à fait possible de se passer de beaucoup de choses qui de prime à bord nous apparaissent essentielles.
En fait, l’idée de nous passer de certaines choses nous semble grave, et notamment lorsque cela est un choix tout à fait délibéré et non le résultat d’une pression ou d’une contrainte. Essayez donc de vous passer de votre voiture, de votre télévision ou de votre montre durant un certain temps, et tentez de définir les effets de cette expérience sur votre psychisme ou sur votre niveau de sérénité et de calme, et donc de chercher des alternatives possibles à ces objets apparemment nécessaires. Je suppose que vous n’avez pas été souvent dans une situation où vous deviez vous débarrasser d’une chose essentielle pour vous, si vous deviez le faire comment vous y prendriez vous ? Vous pourriez, par exemple, pour compenser ce manque, faire de la marche à pied ou tout autre exercice physique, passer beaucoup plus de temps avec votre famille, profiter des plaisirs simples de la vie ou bien encore prendre pleinement conscience du temps qui passe.
J’aimerais rappeler que certains Anciens disaient que la différence qu’il y a entre le croyant se présentant devant son Créateur et le débauché dans la même situation est la même que celle qu’il y a entre l’absent revient à sa famille après un long voyage et l’esclave en fuite qui est ramené devant son maître ; ainsi, la différence ici est entre celui qui choisit et celui qui est contraint.
C’est ainsi qu’après une prise de conscience visant à se débarrasser du superflu, on recouvre peu à peu ses esprits, on a une pratique religieuse plus intense, un cœur plus recueilli et soumis lors des adorations et ce qui tempête et rugit en nous commence à se calmer.
Par le truchement de cette expérience qui m’a amené à m’éloigner temporairement de mon téléphone j’ai pris conscience de l’immense emprise qu’ont certains objets et instruments sur moi ainsi que du fait que ceux-ci dévorent mon existence, mon temps, ma pensée, ma concentration, mon esprit, mes relations avec ma femme, mes enfants, mes amis et même tous mes plaisirs. Par ailleurs, il est possible d’ajouter que du point de vue médical ces nouvelles technologies abîment notre santé, affaiblissent notre audition et notre vue, nous donnent des problèmes de vertèbres et de dos du fait de notre position quand nous les utilisons et réduisent nos capacités intellectuelles. En outre, ces appareils modernes font de nous les prisonniers d’habitudes qui finissent par nous gouverner de manière inconsciente et à notre corps défendant, ils grandissent avec nous et nous maintiennent dans une sorte de cachot tout au long de notre vie.
Voici une liste non exhaustive des écueils provoqués par nos portables :
-Les innombrables messages publicitaires ou de prédication envoyés à tous et que la plupart d’entre nous effaçons avant même de les lire.
-Les gens qui ne cessent d’envoyer des messages comme s’ils n’attendaient aucune réponse, c’est là une manière fort intrusive de rester en contact avec leur ami.
-D’autres envoient encore et encore des messages qui restent sans réponse, puis ils ralentissent le rythme, puis ils commencent à faire des reproches et finissent par se fâcher, car ils pensent que cette absence de réponse cache un problème personnel, ces fâcheux en cherchent la cause mais ne la trouvent pas, certains d’entre eux tentent de rencontrer la personne afin de s’expliquer avec elle.
-Il y ceux qui sont gentils et bien intentionnés, ils envoient des messages pour prendre des nouvelles d’un frère et être sûrs qu’il va bien, mais quand ils ne reçoivent plus de messages de la part de la personne en question, alors ils s’inquiètent et s’imaginent le pire, ce qui les amènent à envoyer encore plus de du’as demandant la santé et le bon rétablissement de leur ami.
-Il y a les numéros de ceux qui jamais ne se lassent d’envoyer des messages, ils envoient des messages encore et toujours espérant obtenir une réponse, ils sont persuadés que le destinataire lit ce qu’ils écrivent, mais qu’il ne peut pas répondre pour une raison ou pour une autre, alors ils changent de style, ils s’énervent puis se calment et essaient de jouer sur les sentiments.
-Il y a ceux qui informent d’un heureux événement comme un mariage, la naissance d’un bébé ou la sortie de l’hôpital d’un malade, mais comme il est triste d’adresser spécialement ce type de messages porteurs d’une bonne nouvelle à un frère en attendant de lui un mot de félicitation, un encouragement ou une invocation et finalement ne recevoir aucune réponse.
-Et puis il y a les numéros de ceux qui sont décédés et qui ont quitté cette vie sans avoir le temps de dire au revoir, ceux-là aimeraient probablement, là où ils sont, que des gens leur envoient des messages pour prendre de leur nouvelle !
Ô Toi le Très Miséricordieux et Tout Miséricordieux, descends Ta générosité, Ton pardon et Ta douceur sur les âmes qui T’on évoqué un jour, qui se sont attachées à T’adorer sans Te donner aucun associé et qui se sont prosternées devant Toi, descends aussi tous ces bienfaits sur nos parents ainsi que sur tous les musulmans, ô Allah fais que nos frères nous pardonnent et que nous leur pardonnions, réunis-nous tous dans le firdaws. Amîn.
Dr. Salmân ibn Fahd al-‘Awda