Quelle est la différence entre les droits dont il est possible de s‘acquitter et ceux qui ne le sont pas ? Et quel est le sens de l’expression « s’acquitter de ses droits » ? Ceux dont on ne peut s’acquitter, est-il suffisant de s’en repentir (demander pardon de façon générale) ou doit-on demander pardon et invoquer pour la personne et mentionner ses bons aspects, et entretenir des bonnes relations avec elle, même si elle a su que j’ai pu la médire par exemple ?
De même, concernant les péchés qui concernent des droits dont il est possible de s’acquitter, est-ce que reconnaitre avoir menti sur une personne revient à lui restituer son droit, est-ce utile de le faire ?
Peut-on considérer qu’on s’est acquitté de ce droit ? Si cette personne ignore qui a fauté à son encontre et a menti la concernant ce qui lui a causé des problèmes. Dois-je reconnaitre que c’est moi qui en est à l’origine, ou est-ce suffisant d’apporter une solution au problème, ou de compenser le méfait subi, même secrètement ?
Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :
Certains droits sont tangibles et matériels comme les biens et les blessures causées par un tiers, d’autres sont intangibles et immatériels comme la médisance et les fausses accusations.
Celui qui doit s’acquitter d’un droit relatif à un bien doit le restituer à son ayant-droit ou lui demander de l’en acquitter. Et il ne suffit pas de lui demander pardon de façon générale mais il faut lui détailler la raison pour laquelle on lui demande pardon.
Celui qui a menti en fournissant un faux témoignage ou autre, provoquant ainsi la perte d’un droit appartenant à l’homme sur lequel il a menti, il faut alors lui restituer son droit et lui demander de l’en acquitter.
Dans le livre Sharh Mukhtasar Al-Khalîl de Al-Kharashî, il est dit : « Toute personne sera responsable et devra s’acquitter du droit en question s’il commet un de ces actes : être directement coupable de la perte d’une vie humaine ou d’un bien qu’il s’agisse d’un homme qui est en guerre contre les musulmans ou d’un voleur ou autre. Celui qui y contribue en apportant un témoignage, en prenant possession du bien soit en l’achetant, soit en le déposant quelque part, ou par tout autre moyen de façon à ce qu’il échappe à son propriétaire, ou en cachant son témoignage ou en donnant des informations sur ce qu’il sait de façon à ce qu’il ne puisse pas le retrouver. » Fin de citation.
Il est permis de lui restituer son droit en secret, sans l’informer que c’est lui qui est à l’origine du mensonge ou de la perte de son droit.
Pour ce qui est des droits qui sont immatériels et intangibles, les savants divergent pour savoir s’il est obligatoire ou non de s’acquitter de ce type de droits. Et surtout, dans le cas où l’ayant-droit n’est pas au courant de qui en est à l’origine et que, en plus de cela, on craint que s’il lui demandait pardon, cela causerait une animosité entre eux. Selon nous, l’avis prépondérant est celui qui stipule la non-obligation de demander l’acquittement du droit et se contenter de se repentir entre soi et son Seigneur.
Dans son ouvrage Rawdat al-Tâlibîn Wa ‘Umadat al-Muttaqîn, Al-Nawawî, qu’Allah lui fasse miséricorde, a dit :
« Les savants de notre école (shaféite) ont dit : le repentir se divise en deux catégories : une entre le serviteur et son Seigneur, ce qui permet d’être absout de péché. Et une autre, manifeste, par le biais de laquelle il est possible de réhabiliter un fidèle concernant la crédibilité de son témoignage ou sa légitimité à exercer une fonction à responsabilité.
La première consiste à : regretter son acte, le délaisser sur le champ, prendre la résolution de ne plus le commettre.
Ensuite, si le péché ne concerne pas un droit monétaire dû à Allah ou à un serviteur, comme le fait d’avoir embrassé une femme qui nous est interdite et s’être collé à elle sans toutefois avoir eu de rapport sexuel, alors son repentir se limitera au fait mentionnés.
Mais s’il s’agit d’un droit monétaire come la Zakât, un vol, un crime en lien avec les biens des gens, il est alors obligatoire, en plus de ce que nous venons d’énoncer, de s’en acquitter auprès de l’ayant-droit. Et ce, en s’acquittant de la Zakât, c’est-à-dire en la réglant, ou en rendant les biens à leurs propriétaires s’il en reste,
- Et si rien n’en reste alors lui en donner l’équivalent.
- Ou alors, demander à l’ayant droit qu’il ne lui tienne pas rigueur de son acte et l’en acquitte. Il faut en tout cas absolument l’informer s’il n’est pas au courant, ou le lui faire savoir s’il est absent et que son droit a été transgressé en un autre endroit.
- Si l’ayant droit est décédé, il devra restituer le bien à ses héritiers.
- S’il n’a pas d’héritiers et qu’on n’a pas de nouvelles de lui il remettra le bien à un cadi reconnu pour sa bonne conduite et sa religiosité.
- Si cela n’est toujours pas possible, il devra en faire l’aumône à des pauvres en ayant l’intention de s’acquitter de son droit s’il le retrouve …
- Si le fautif n’a pas les moyens de restituer ce droit, il devra toutefois émettre l’intention de le faire dès qu’il le pourra.
- S’il meurt avant de pouvoir le faire, alors on peut espérer qu’Allah, de par Sa grâce, LUI pardonne …
Par ailleurs, si le péché en question correspond à un droit qui n’est pas monétaire. S’il s’agit d’une peine légale pour fornication ou consommation d’alcool, le coupable a le droit d’informer les autorités pour lui appliquer la peine si elles ne sont pas au courant. Mais il lui est aussi permis de ne pas divulguer son péché ce qui est la meilleure chose à faire. Mais si les autorités sont informées alors il ne peut plus le dissimuler et la peine lui sera appliquée …
Si le péché concerne le droit d’une personne, comme le talion ou la peine pour fausse accusation, le coupable devra se mettre à disposition de l’ayant-droit et lui permettre de le récupérer. S’il n’est pas au courant de qui est le coupable, on devra le lui dire dans le cas du talion. Le coupable pourra avouer par exemple : « c’est moi qui ai tué ton père et je suis sujet à la loi du talion. Tu peux l’appliquer si tu veux ou si tu veux, me pardonner. »
Pour ce qui est de la peine pour fausse accusation, nous avons déjà mentionné dans le chapitre relatif aux imprécations (Li’ân) entre époux qu’il y a une divergence entre les savants : est-il obligatoire d’informer du péché. Le savant Al-‘Ibâdî ainsi que d’autres sont catégoriques pour affirmer qu’il est obligatoire d’informer la personne qui a subi le préjudice, comme dans le cas du talion.
Pour ce qui est de la médisance, si l’homme sur lequel on a médit n’est pas au courant, alors j’ai lu dans les fatwas de Al-Hinâtî qu’il est suffisant d’éprouver du regret et de demander pardon. Mais s’il est au courant, et que la personne considère que ce cas est analogue au talion et à la fausse accusation, alors il faut pour s’acquitter de ce droit, aller voir la personne sur laquelle on a médit et lui demander de le pardonner et de l’acquitter. Si cela n’est pas possible parce qu’il est mort ou parce qu’il habite trop loin, il implorera le pardon divin en sa faveur. En revanche, il n’y a pas lieu de demander quoi que ce soit à ses héritiers. » Fin de citation.
Et Allah sait mieux.
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