Je sais bien qu’en principe, une femme est censée se soigner chez une femme médecin. Mais si je dispose d’une assurance de santé, m’est-il permis de me soigner chez un médecin homme pour bénéficier de frais de soin réduit ? Sachant que je dispose de l’argent me permettant de me soigner chez une femme médecin musulmane dans le privé sans avoir recours à cette assurance. Je peux assumer les frais de ces soins. Le statut est-il le même si les frais des soins sont onéreux, par exemple, s’il s’agit d’une opération, j’entends par là du point de vue de la licéité ou de l’illicéité, ou le statut diffère-t-il dans ce cas ? Je peux également dans ce cas assumer les frais de l’opération sans avoir recours à l’assurance.
Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :
Le principe de base stipule qu’à priori, il n’est pas permis à une femme musulmane de dévoiler quoi que ce soit de son corps à un médecin s’il lui est possible de consulter une femme médecin en mesure de lui fournir les soins suffisants.
Reste à voir ce qu’il en est de la possibilité de consulter un médecin homme gratuitement (sans avoir à le payer) alors qu’on a la possibilité de se rendre chez une femme médecin, mais en devant lui régler la consultation. Cette question doit faire l’objet d’une analyse et d’un effort de réflexion pour en définir le statut. Certains savants accordent une dérogation dans ce genre de cas, même dans le cas où il y a une différence de prix entre une femme médecin et un médecin homme. Ils sont d’avis que celui qui est le plus onéreux des deux ne doit pas être pris en compte et d’agir comme s’il n’existait pas.
Dans le livre Tuhfat Al-Muhtâj, Ibn Hajar Al-Haytamî a dit, sachant que Al-Ramlî a été du même avis dans Nihâyat Al-Muhtâj : « Il y a à cela, comme condition (pour qu’une femme ait le droit de consulter un médecin homme), qu’on ne trouve pas de femme qui puisse accomplir cette tâche comme il se doit… et le fait qu’on ne trouve qu’une personne qui n’accepterait qu’un salaire supérieur à ce qui est pratiqué dans les usages, alors, selon ce qui nous semble, on devrait faire comme si celui-ci n’existait pas. Plus encore, si un mécréant acceptait de le faire sans salaire et qu’un musulman ne l’accepterait qu’en échange d’un salaire. Dans ce cas, il est tout à fait possible qu’on puisse agir comme si ce musulman n’existait pas (et donc confier la tâche au mécréant). Et ce, conformément au statut que nous verrons un peu plus loin au sujet de la mère qui demanderait une pension alimentaire pour la garde des enfants dont le montant serait conforme aux usages, et que le père trouverait une femme qui accepterait de le faire sans contrepartie. Dans ce cas, le droit de garde de la mère serait caduc. On doit donc prendre en ligne de compte cette différence. » Fin de citation.
Al-Shabrâmilsî a dit dans ses annotations sur le livre Nihâyat Al-Muhtâj : « Lorsque l’auteur fait référence à un salaire conforme à ce qui est pratiqué dans les usages, et qu’un autre, musulman, propose un salaire légèrement supérieur, on doit agir comme si ce musulman n’existait pas. Et cet avis de l’auteur est à prendre en considération. » Fin de citation.
Dans la Mawsû’a Al-Fiqhiyya Al-Kuwaytiyya, il est dit : « Pour ce faire, les savants Shafi’ites posent comme condition qu’il n’y ait pas de femme qui puisse assurer les soins médicaux si le patient est une femme… Ils ont d’ailleurs énoncé que dans le cas où on ne trouverait qu’une femme médecin qui accepterait uniquement un salaire supérieur à ce qui est pratiqué selon les usages, on devrait agir comme se elle n’existait pas. Même si on ne trouvait qu’un mécréant qui accepterait d’assurer les soins sans salaire et qu’un musulman en exigerait un, on pourrait aussi considérer ce musulman comme s’il n’existait pas et agir en conséquence. » Fin de citation.
Nous n’avons pas trouvé de tels propos chez d’autres savants que ceux de l’école Shâfi’ite ! Et il nous semble qu’on ne doit pas agir en fonction de leur avis, mais plutôt rester attaché au principe de base tant que les frais médicaux auprès d’une femme médecin sont facilement supportables et ne causent pas de préjudice à qui doit les payer. Cette interdiction est davantage confirmée si les parties du corps que la femme doit montrer sont encore plus intimes que d’autres. Dans son ouvrage Rawdat Al-Tâlibîn, Al-Nawawi a dit : « Dans le cadre de soins médicaux, pour qu’il soit permis à un médecin homme d’ausculter une femme, il est une condition qu’il n’y ait pas de femme médecin qui puisse assurer ces soins… Ensuite, il est suffisant qu’on ait besoin de regarder le visage ou les mains d’une femme pour qu’il soit permis de le faire. Pour regarder d’autres parties de son corps, il faudrait qu’un besoin plus conséquent se fasse ressentir… Al-Ghazâlî a dit : pour ce faire, il faudrait que le besoin de le faire ne nous amène pas à considérer que ce soit pour une raison affectant l’honneur d’un homme et que ce soit accepté conformément aux usages… Et s’il est nécessaire de regarder les deux orifices, il faudrait qu’il y ait davantage besoin de le faire pour l’autoriser. » Fin de citation.
Dans son livre Qawâ’îd Al-Ahkâm, Al-‘Izz ibn Abd Al-Salâm a dit : « Se couvrir les parties intimes et très intimes (le sexe et les fesses) est une obligation. C’est un des actes les plus honorables et une des habitudes les plus belles. Surtout pour les femmes qui sont étrangères. Mais il est permis de les dévoiler dans les cas de nécessité et de besoins.
Dans le cas de besoin, par exemple, quand chacun des conjoints regarde l’autre… quand un médecin doit ausculter un patient…
Pour ce qui est des cas de nécessité, par exemple, quand il est indispensable de couper un bout de peau, de soigner une blessure. Pour qu’il soit permis de regarder les parties intimes comme le sexe et les fesses, étant donné qu’il est vraiment inconvenant de le faire, les conditions pour ce faire sont plus rigoureuses que celles qui le sont pour regarder le reste du corps. Cela est encore plus confirmé quand il s’agit d’une femme puisqu’on peut redouter dans ce cas d’être tenté. De même que regarder les genoux n’est pas comme regarder les fesses. » Fin de citation.
Abu Bakr Al-Haddâd Al-Hanafî a dit dans le livre Al-Jawhara Al-Nayyira ‘Ala Mukhtasar Al-Qaddûrî : « Si la maladie se situe au niveau du sexe alors il convient d’enseigner à une femme comment la soigner. Si aucune femme ne peut la soigner et qu’on redoute que la patiente décède, ou qu’elle soit touchée par un mal plus important ou une douleur insupportable, il faudra recouvrir toutes ses parties et n’en dévoiler que la partie malade. Ensuite un homme pourra venir la soigner tout en détournant son regard de ce qu’il n’a pas le droit de voir autant que possible, sauf l’endroit de la blessure. » Fin de citation.
Dans le livre Radd Al-Muhtâr, Ibn ‘Abidîn a reproduit ces propos et a ajouté : « Quand l’auteur dit ‘’il convient’’, cela signifie que c’est obligatoire. » Fin de citation.
Et Allah sait mieux.
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